mercredi 7 mars 2012

Ach Merkel Gross Malheur !


Faites péter les saucisses et les bretzels, l’Allemagne est le paradis sur terre et le bonheur de l’humanité – et donc de la France – passe apparemment par notre germanisation si l'on en croit notre bon président-candidat ! Mais les Allemands sont-ils vraiment fiers et heureux de faire des sacrifices pour maintenir une économie vigoureuse et florissante ?

D’abord, leur économie a tout de la demi molle malgré les AAA et les leçons que Merkel donne à tout le monde ! La dette allemande n’a rien à envier à celle de ses petits camarades européens – supérieure à celle de l’Espagne, n’inquiétait-elle pas il y a quelques mois le boss de l’Eurogroupe Jean-Claude Juncker, qui s’étonnait de la constance avec laquelle politiciens et économistes teutons arrivent à éviter le sujet… Sans parler des entourloupes comptables entre les Länders et l’état fédéral qui permet de camoufler une bonne partie de cette dette, ni des dédommagements de guerre que l’Allemagne a omis de verser entre autres à la… Grèce après la réunification de 1990. On ajoute à ça les prévisions de croissance pour 2012 en chute libre, la stagnation de la consommation et des heures travaillées, la récession démographique, pas de quoi chanter Kikiriki !

Mais surtout, les déclassés du miracle allemand n’ont pas leur mot à dire – et de moins en moins. Il faut d’abord savoir qu’il n’y a pas de salaire minimum en Allemagne : quand on travaille dans l’industrie avec un bon syndicat pour négocier les salaires, c’est supportable, mais ce n’est pas la majorité, du coup cela donne 6,5 millions de travailleurs pauvres – à moins de 10 euros de l’heure – y compris 2 millions en dessous de 4 euros ! Autres chiffres, un tiers des emplois y sont précaires : soit à durée déterminée, soit à temps partiel, et un dixième est un minijob – salaire plafonné à 400 euros par mois, sans charges ni prestations sociales…

Et ces petits boulots de misères, on est bien obligé de les accepter depuis que le gouvernement Schröder a instauré un régime de terreur dans l’indemnisation des chômeurs ! Les agences pour l’emploi ayant à atteindre un quota de 40% de radiations, tous les coups sont permis : impossibilité de refuser un emploi, obligation de se soumettre aux fameux « jobs à un euro » sous peine de sanctions, rejets de dossiers arbitraires, surveillance des comptes bancaires... Les tribunaux sont tellement saturés de demandes de recours – jusqu’à des plaintes pour travail forcé qui devraient arriver devant la Cour Européenne des Droits de l’Homme d’ici dix ans – les tribunaux sont très forts pour faire traîner les dossiers –, que les dépôts de plaintes sont désormais… payants !

Mais bon, au moins en Allemagne, quand le président à trop de casseroles au cul, il démissionne comme Christian Wullf, il n’est pas déclaré irresponsable quinze ans plus tard pour échapper à la justice tout en siégeant au conseil constitutionnel…


Publié dans Siné Mensuel n°7, Mars 2012